Enfant, j'ai découvert avec circonspection le sens étymologique du mot photographie. Il m'a fait imaginer des possibilités que la photo traditionnelle n'offrait pas vraiment. Ecrire, dessiner avec la lumière, cela demeurait une vue de l'esprit, peu conforme à ma pratique d'alors. J'aurais pourtant aimé me sentir plus en intelligence avec la clarté au point de savoir diriger ses faisceaux, mais les résultats confus de mes premiers clichés demeuraient le produit maladroit des êtres contraints par un système qu'ils ne maîtrisent guère. Patient, sinon par nature, par nécessité, j'ai poursuivi mon bonhomme de chemin sans remiser complètement mon fantasme initial. Tout en faisant mes gammes, je conservais donc l'ambition de remplacer la griffure de graphite du dessinateur par l'effleurement sensuel d'un trait lumineux ensemençant les brouillards de sels argentiques. Sorti de la grandiloquence de l'enfance et des sortilèges des marchands de sable, mon expérience du médium me permit enfin de réaliser mon rêve. Comme quoi, même la grandiloquence peut nous mener à la simplicité. J'ai exposé pour la première fois en 2000 les premières images de cette série à Tokyo et je prépare la prochaine sans nostalgie des premiers temps car on a beau dire : plus ça va, plus on est libre. Enfin, qu'on ne se méprenne pas, je parle ici de création.