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laurence savelli
Ileana Cornea, Paris février 2008
L’expérience de la sensibilité, les métamorphoses de la curiosité chez les artistes correspondent à des processus intimes… On ne choisit jamais une forme d’expression artistique par hasard. Pourquoi le collage ?
Les premiers collages célèbres de l’histoire de l’art, on les doit à Picasso et à Braque. C’étaient des recherches sur l’espace en peinture : « des simples papiers colorés, découpés au petit bonheur ; même pas découpés, déchirés et puis tant bien que mal rejointoyés ,» écrit Jean Paulhan qui les a ingénieusement baptisées des « machines à voir ».
Un peu plus tard, 1918 avec la découverte de la « photo – montage » par Raoul Haussman et Hannah Hoch le collage apparaît comme une « machine à voir » plus performante. La mise en perspective de la réalité à travers la photographie augmente le contenu des œuvres et dans le domaine de la représentation, un nouveau langage poétique a le droit de cité.
« Je colle et je recolle les morceaux de ma vie… J’essaye de formuler ce que je ne m’explique pas », écrit Laurence Savelli. Désormais elle cherche par de là les mots et les concepts qui furent pendant longtemps son credo existentiel.
Coulures, couleurs épaisses, superposition de matériaux ; bois, et matières transparentes. Il y a le noir, et le miroir. Il y a la photographie et l’infographie, il y a le besoin d’expression, d’appréhender « les choses » à travers le toucher, le regard, leurs fragmentations équivoques ; Les impulsions secrètes de l’inconscient font signe… Il y a eu l’Inde.
Quelques photographies cousues, graphitées sur des toiles déjà travaillées apparaissent comme des commémorations. Sinon, c’est le remue-ménage, le chaos, la théâtralisation de l’image, les ratures, les déchirures. Les actions picturales de Laurence Savelli donnent parfois à ses toiles l’aspect des affiches lacérées. Quoi qu’il en soit, il y a du drame et de l’inquiétude dans ce travail. Aussi du surplus, une charge, un trop. … Le palimpseste de la mémoire accumule les émotions de l’artiste devenues images et les images déposent le temps dans une nouvelle réalité.
Contrairement au travail formel de Picasso et Braque, Laurence Savelli développe à travers ses collages une symbolique liée à « un vouloir dire » proche de la vie, proche de l’humain. Il en résulte un travail « à fleur de peau ».
Les collages, et photomontages représentent pour elle les techniques impérieuses qui réfléchissent le regard et déposent le temps.
L’artiste sort une des photographies qu’elle a prise en Inde où elle surprend à travers son objectif au moins dix personnes juchées sur un camion. Toutes la scrutent d’un regard curieux en souriant. Qu’elle le veuille ou non, de spectatrice, elle devient l’actrice de cette scène, comme dans le théâtre de rue d’Augusto Boal.
Une jouissance secrète, mais aussi une gêne accompagne cette subite prise de conscience ; Le syndrome de l’étranger … La condition de l’artiste.
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